Anne Mignon Sage-femme libérale

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Lettre ouverte

Signer ou pas la nouvelle convention ?

Chers parents et futurs parents,

Vous en avez probablement entendu parler dans les médias, les sages-femmes sont à bout de souffle…

Face aux tarifs Inami actuels, il n'est plus possible de vivre décemment de notre profession tout en offrant pourtant des soins de qualité. Pour subsister avec ces tarifs, il faudrait enchaîner des consultations de 20 à 30 minutes maximum tout au long de la journée. Cette cadence nous transformerait en simples robots, incapables d'apporter notre véritable valeur ajoutée lors du suivi post-partum, au détriment de notre santé mentale.

Tout comme les médecins, nous avons l’obligation de nous former en continu afin de pouvoir continuer d’exercer. Notre métier ne se résume pas à faire de l’administratif comme voudraient le faire croire les nouveaux coachs en périnatalité, doulas et autres (nous faisons la même chose avec la partie médicale en plus, de manière légale, incluant les responsabilités). Nous accompagnons l’être humain dans une période fragile et sensible, bouleversée par diverses émotions que nous accompagnons au mieux, en toute sécurité, en permettant aux parents, grâce à nos conseils, de faire des choix éclairés. Nous sommes la seule profession s’occupant de 2 patients à la fois (maman - bébé), parfois plus en cas de jumeaux, tout en étant rémunéré pour un suivi unique (alors que le pédiatre facture par enfant en cas de jumeaux). Dès le 6e jour, la consultation, peu importe sa durée (allant parfois jusqu’à 2h! ainsi que la disponibilité entre les consultations) est facturée à 44,90 euros la séance en présentiel.

Quand un ostéopathe se fait verser en moyenne 50 à 70 € pour une séance de maximum 45 minutes, quand le taux horaire de votre garagiste varie entre 80 et 145 € de l’heure, quand le serrurier demande déjà 95€ de déplacement sans avoir encore touché votre porte, et quand une esthéticienne prend 70 à 90 € pour un massage prénatal d’une heure déshabillage/rhabillage compris (massage que la sage-femme est formée à prodiguer avec son sens du toucher et ses mains expertes et connaissant les zones qui déclencheraient potentiellement les contractions – pensez-y), payer votre humble servante 44,90 € la séance médicale (et même pas à l’heure, auxquels il faudra enlever 50 à 60% de charges),  n’est ce pas choquant ?!

Qu’en est-il des heures consacrées à la rédaction des dossiers et autres courriers (médecins, mutuelle, patients, …), à la tenue comptable ou pire, aux heures perdues avec les mutuelles ayant "oublié" de régler le tiers-payant au prestataire de soins ou pour les patientes qui ont oublié de dire qu’elles n’étaient pas en ordre de mutuelle ? Et la location des locaux de consultation ? Les charges engendrées par la mise en conformité de ces locaux (accessibilité, hygiène, évacuation, …) ? Une fois déduits en plus les frais de déplacement pour les soins à domicile, de matériel spécifique, de stationnement éventuel, que reste-t-il réellement pour vivre ?

Le calcul est simple : l’activité de sage-femme libérale conventionnée réalisée dans les règles de l’art (50-60 h/ semaine, + environ 5h de travail administratif (dossiers médicaux, comptabilité), réponse aux messages (sms, WA), entre 30 et 150 minutes par patient, avec du matériel adapté à renouveller et une formation continue) n’est pas viable !

Est-il normal d’attendre que des soins de santé prodigués par des sages-femmes soient gratuits alors que des séances “sauna bébé”, une écho 4D, une séance photo, un bain bébé enveloppé, etc. sont facturés plus de 100€ d’emblée, sans remboursement, sans réelle formation reconnue? Que valent toutes nos années d’études? Que valent nos années de formation continue? Que vaut notre temps? Que vaut notre disponibilité? Que vaut l’individualisation de tous nos conseils? Que vaut notre écoute? Que vaut notre expertise? Que vaut notre santé mentale? Mais, surtout, que vaut votre santé? Que vaut votre sécurité émotionnelle? Que vaut l’accompagnement et le suivi médical de votre bébé?

Afin de me permettre de me respecter, de continuer à vous respecter, à vous proposer mes compétences, mon expertise, ma disponibilité, j’ai fait le choix compliqué de me déconventionner. Cela signifie qu’à partir du 1er mars 2025, mes prestations ne seront remboursées qu’en partie par l’inami ou allant de 80 à 100% si vous possédez une assurance. Cependant, au 26/3, si 40% des sages-femmes sont déconventionnées, l’intervention de l’Inami sera complète et non plus partielle.

Je m’engage à continuer de : 
       - Prendre le temps nécessaire pour chaque patiente lors de la séance et en réponse à ses messages
       - Apporter mon expérience et une réelle valeur ajoutée
       - 
Être pleinement à l'écoute
       - 
Faire de chaque situation ma préoccupation
       - 
Continuer de travailler avec passion à la rencontre de toutes ces familles avec leurs particularités

Cette décision a été extrêmement difficile à prendre, mais elle est nécessaire pour continuer à exercer ma profession avec passion et offrir des soins de qualité à mes patientes. J’ose espérer que vous comprenez ce choix et vous remercie pour votre confiance.

En toute humanité, 


Anne, Sage-femme

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